Les propositions législatives déposées le 18 juillet dernier n’ont pas fini de faire couler de l’encre. Effectivement, le ministre des Finances a déposé un nouveau projet de propositions législatives le 13 décembre dernier. C’est pourquoi nous vous présentons le troisième chapitre en lien avec ce sujet suite aux articles intitulés « Planification fiscale au moyen de sociétés privées » et « Dernières modifications suite aux propositions législatives du 18 juillet dernier » qui ont été publiés récemment dans l’InfoCPA.
Il convient d’abord de se rappeler que le ministre des Finances souhaite limiter le fractionnement de revenu entre les membres d’une famille lorsqu’il n’y a aucun apport en main-d’œuvre, en capitaux ou encore lorsqu’aucun risque financier n’est assumé par le particulier. Ces mesures s’appliquent, entre autres, sur les dividendes, les intérêts, le revenu provenant de la disposition d’un bien et les gains en capital. Par contre, il est important de noter que les gains en capital découlant de la vente d’actions admissibles de petite entreprise par un particulier ou encore qui sont attribués par une fiducie à un bénéficiaire ne sont pas assujettis à ces règles. De plus, les biens hérités à la suite du décès d’une autre personne ne seront pas assujettis aux règles relatives au revenu fractionné sous réserve de certaines conditions.
Les documents déposés par le Ministre Morneau apportent des précisions sur l’application de l’impôt sur le revenu fractionné en considérant quatre situations particulières : les particuliers âgés de 18 ans et plus, les particuliers âgés entre 18 et 24 ans, les particuliers âgés de 25 ans et plus et un allègement supplémentaire pour les conjoints. Afin de faciliter la compréhension, chacune de ces catégories est abordée séparément dans le texte qui suit.
Particuliers âgés de 18 ans et plus
Le principe de base est que toute distribution d’une société à un membre de la famille âgé de 18 ans et plus est considérée comme du revenu fractionné, à moins d’être assujetti à l’une ou l’autre des exceptions mentionnées ci-dessous. Les exceptions qui s’appliquent à cette catégorie comprennent deux situations spécifiques, à savoir une entreprise autre qu’une entreprise liée ou encore une entreprise exclue.
Entreprise autre qu’une entreprise liée
Tout d’abord, les règles relatives au fractionnement de revenu s’appliqueront uniquement en présence d’une entreprise liée. En termes généraux, cette définition est respectée lorsqu’un particulier est lié avec une personne qui participe activement à l’entreprise ou encore que cette personne possède des actions dont la juste valeur marchande est plus élevée que 10 % de la juste valeur marchande totale de la société. Ainsi, dans la situation où il ne s’agit pas d’une entreprise liée, l’impôt sur le revenu fractionné ne s’applique pas.
Entreprise exclue
De plus, les règles relatives au fractionnement du revenu ne s’appliqueront pas lorsque le montant provient d’une entreprise dans laquelle le particulier participe activement, de façon régulière, continue et importante, soit dans l’année d’imposition en cours ou dans cinq années d’imposition antérieures (consécutives ou non). En général, un particulier participe activement, de façon régulière, continue et importante dans une année d’imposition s’il travaille pour l’entreprise au moins 20 heures par semaine. À noter toutefois que les gains réalisés lors de la disposition des actions de l’entreprise seront exclus des règles sur le revenu fractionné seulement si le particulier satisfait au critère des cinq années antérieures.
Particuliers âgés entre 18 et 24 ans
En plus des exceptions mentionnées dans la section précédente, les particuliers âgés entre 18 et 24 ans ne seront pas assujettis à l’impôt sur le revenu fractionné en présence d’un rendement exonéré et sur les contributions en capital indépendant du particulier.
Rendement exonéré
En effet, il est permis d’attribuer un montant à un membre de la famille lorsqu’il s’agit d’un rendement exonéré par rapport à son apport en capitaux. Ce rendement ne doit pas dépasser le taux prescrit en vigueur sur la juste valeur marchande des biens investis.
Capital indépendant
De plus, le particulier aura droit à un rendement raisonnable sur ses apports en capitaux qui proviennent du capital indépendant du particulier. Pour ce faire, l’argent ne doit pas provenir d’un membre de sa famille, ne doit pas avoir fait l’objet d’un emprunt ni avoir été acquis en tant que dividende d’une entreprise liée. De façon générale, le capital indépendant d’un particulier est un bien gagné, hérité ou acquis par ce dernier.
Particuliers âgés de 25 ans et plus
Tout comme les deux catégories mentionnées précédemment, toute distribution reçue par un particulier âgé de 25 ans et plus est considéré comme du revenu fractionné, à moins d’être assujetti à une exception. En plus de pouvoir se prévaloir des exceptions présentées ci-dessus, les deux exceptions suivantes s’ajoutent : les actions exclues et le rendement raisonnable.
Actions exclues
Les règles applicables au fractionnement de revenu ne s’appliqueront pas lorsque le membre de la famille détient plus de 10 % des actions d’une société en termes de vote et de valeur. Pour utiliser cette exception, le pourcentage de revenu d’entreprise qui provient de la prestation de service doit représenter moins de 90 % du revenu total. De plus, un maximum de 10 % du revenu tiré de la prestation de service peut provenir d’une autre société liée. Finalement, la société ne doit pas être une société professionnelle.
Rendement raisonnable
Tel que discuté précédemment, le particulier âgé entre 18 et 24 ans peut se voir attribuer un montant sans conséquences fiscales lorsqu’il s’agit d’un rendement exonéré ou un rendement raisonnable par rapport aux capitaux indépendants du particulier. Pour le membre de la famille qui est âgé de 25 ans et plus, cette exception s’applique également, en plus d’être bonifiée. Dans cette situation, le rendement raisonnable est considéré en tenant compte de tous les critères suivants : son travail effectué, ses contributions, ses risques assumés, ses montants payés ou tout autre facteur jugé pertinent.
Conjoint
Les règles applicables au conjoint sont les mêmes que celles mentionnées ci-dessus. Par contre, une exception a été ajoutée par le ministre des Finances qui s’applique spécifiquement aux conjoints. En effet, lorsqu’un particulier n’est pas assujetti aux règles sur le fractionnement de revenu et qu’il est âgé de plus de 65 ans, les règles relatives au fractionnement du revenu ne s’appliqueront pas à son conjoint également. Cette règle est instaurée afin de permettre une harmonisation avec la règle actuelle sur le fractionnement de revenu de pension.
Conclusion
Les nouvelles règles présentées dans cet article seront applicables à compter du 1er janvier 2018. Pour cette raison, il est opportun de maximiser le fractionnement de revenu avec les membres de votre famille qui sont majeurs au plus tard le 31 décembre 2017 et ce, afin de réduire votre facture fiscale avant que les règles ci-dessus s’appliquent.
À compter de 2018, un casse-tête législatif sera mis en application pour qu’un propriétaire d’entreprise puisse continuer à fractionner avec les membres majeurs de sa famille.
Nous vous reviendrons dans les prochaines semaines avec des exemples plus précis relativement à ces nouvelles propositions.